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The World
Ce texte a été écrit à l'occasion de la session d'EklaBugs de Mai 2016, session anniversaire d'EklaBugs. J'avais comme une envie de m'étendre sur le sujet. Et ne cherchez pas le lien entre le titre de cet article et le thème abordé dans cet article, ou vous tomberez des nus. Ma folie vous tuera, vous le savez ça ? ;)
Ce texte n'étant pas le principal pour cette session, il se retrouve classé dans le rab d'EklaBugs. Ce qui était d'ailleurs mon but.Bonne lecture !
Dernièrement, je ne vois plus le temps passer. Peut-être parce qu’il est arrivé dans ma vie. Qui est-il vraiment ? Mes amis disent qu’il s’agirait de l’homme de ma vie. Moi je pense sincèrement qu’il n’est qu’un enquiquineur de première catégorie. De la catégorie des enquiquineurs, des vrais. Vous savez, c’est celle qui regroupent ceux et celles dont on ne veut plus les avoir dans les pattes. Même si je passe beaucoup de temps avec lui, je ne vois pas en lui ce que voient mes amis. Parce que j’ai déjà quelqu’un dans ma ligne de mire amoureuse, qui sait …
Encore une soirée passée avec lui. Une soirée peu glorieuse, pour quelqu’un de mon gabarit. Bonnes notes et comportement irréprochable sont mon lot scolaire quotidien. Et la popularité me colle au train. Autant dire que je rends vraiment jalouse toutes les pimbêches du lycée. Même si de leur point de vue, c’est moi la pimbêche. Mais je ne passe pas mon temps libre à raconter les derniers ragots, ou à jaser devant la nouvelle pop star populaire du moment. Non, moi je suis plutôt de celles qui veulent en découdre. Parce que oui, j’aime me battre.
Cette soirée fut mémorable. Plus pour moi que pour lui. Je me demande encore ce qu’il s’est passé. J’en ai peu de souvenir. Pourtant, il s’est passé quelque chose. J’ai changé. Je ne le vois pas encore, mais mes amis eux le voient déjà. Je parais plus souvent dans les nuages, je ne m’intéresse plus aux arts martiaux – enfin, plus autant qu’avant. Des changements subtils et imperceptibles pour ceux qui ne me connaissent pas. Et quand on me pose la question, je réponds toujours la même chose. « Je ne sais pas. » Des mots qu’ils refusent de comprendre. Ils veulent comprendre. Mais moi aussi, je veux comprendre.
Mes journées commencent à se ressembler. Plus de soirées à chercher la bagarre, plus de bonnes notes, plus rien. Je ne deviens pas une pimbêche, mais presque. Je reste là, tous les soirs, à contempler l’horloge de ma chambre, à regarder le temps s’écouler. Je me rends compte que la grande aiguille tourne plus vite que la petite. Certes, c’est un fait avéré. Mais je me rends compte qu’elle tourne bien vite. Bien trop vite à mon goût. Si seulement elle pouvait ralentir. Voir même s’arrêter. Cela m’arrangerait bien.
Réveil, lycée, devoirs, repas, sommeil. Mes journées sont réduites à ces cinq mots. Il y a bien un sixième mot, mais je refuse de la considérer comme le descriptif d’un élément de mes journées si monotones. Pourtant je devrais l’inclure, ce sixième mot. Car il va rompre ma monotonie.
Cette horloge, je ne le remarque pas, mais la grande aiguille semble avoir ralenti. Je n’ai rien trouvé de mieux que d’acheter une nouvelle horloge, et de la mettre à côté de l’ancienne. C’est comme cela que cela m’a sauté aux yeux. La grande aiguille de ma première horloge avait ralenti.
Je me souviendrai toujours de ce soir-là. Celui-là plus qu’un autre. Parce que c’est ce soir-là que j’ai compris que j’étais différente des autres. Car elle s’est arrêtée. La grande aiguille de mon horloge s’est arrêtée. Et même celle de l’horloge témoin, que j’avais achetée exprès, s’est arrêtée. Je ne m’en étais jamais rendu compte, mais il y avait une présence à mes côtés, à cet instant précis. J’avais beau regarder autour de moi, je ne voyais personne, mais il y avait bel et bien quelqu’un – ou quelque chose – à mes côtés. Je le sentais. C’est un fait indéniable. C’est alors que j’ai repris goût à la vie. À mon ancienne vie.
De nouveau, je passe mes soirées dans la rue. Je me sens ragaillardie par mon exploit. J’avais stoppé net les aiguilles de mes horloges. Certes pendant un temps très court – à peine une seconde. Mais je l’avais fait. J’abuse de mon nouveau don. À mes frais, bien sûr. Avant je n’écopais jamais d’une blessure. Maintenant j’en récolte plein. Parce que j’essaie ce nouveau pouvoir.
Je sentais toujours sa présence lorsque j’utilisais mon don, mais je ne le voyais pas. Mais lui, celui avec qui je m’amusais à l’époque, le voyait. Et depuis que je manie mon don, je vois quelque chose à ses côtés. Quelque chose de flou, tel un fantôme. Et c’est là que j’ai compris qui il était réellement. Parce qu’il s’est dirigé vers moi, un couteau à la main. L’homme de ma vie, disaient mes amis. L’homme de ma vie, qu’ils disaient …
Ma vie était menacée. Je ne pouvais pas fuir, j’avais réussi à me retrouver dans un cul de sac. Je n’avais aucune option. En fait, il y avait une option. Soit ça passe, soit ça casse. Alors j’ai tenté. J’ai tenté de stopper à nouveau le temps. Une seconde. Deux secondes. Trois secondes. Puis il s’est remis à courir. Je venais de dépasser mon record. Alors j’ai retenté. Et j’en ai profité pour me tirer de là, non sans prendre le couteau au passage. Il m’a poursuivie dans toute la ville, mais je l’ai facilement semé, vu que je connaissais chaque ruelle de la ville comme ma poche.
Je l’ai revu le matin après le soir de mon « agression ». Il a fait comme si de rien n’était. Et moi aussi. Mais je savais qu’il n’hésiterait pas, dès qu’une occasion se présenterait. Et moi aussi, je n’attendrais pas qu’une occasion se présente. Je devais en finir une bonne fois pour toute avec cette histoire.
Ce fut un midi très chaud. Plus chaud que d’habitude. On s’est pris le bec, lui et moi. Sur ce qu’on voyait, mais que les autres ne voyaient pas. Et puis le couteau a jailli je ne sais d’où. Et a fini dans son ventre. C’est alors que je l’ai vu. Mon ange gardien, comme j’aime l’appeler. Et pour couronner le tout, le temps s’était arrêté. Il avait poignardé l’enquiquineur de première catégorie à ma place. J’avais beau avoir ma fierté, je me suis tirée de là vite fait bien fait. Je ne voulais pas finir en taule.
Aujourd’hui, j’erre en portant le poids de mes crimes. Mort, vol. Ceci est désormais mon lot. Et Nyeh mon surnom. Mais si vous pensez que le temps joue en ma défaveur, détrompez-vous. Le temps est mon allié, et mon meilleur ami.
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